Le rapport de la commission indépendante (CIASE) dirigée par Jean-Marc Sauvé qui avait mis à jour l’ampleur des abus sexuels perpétrés à l’encontre de mineurs dans l’Église en France, avait également préconisé quelques règles à suivre pour l’indemnisation des victimes. Dans sa recommandation 33, on pouvait lire à propos du financement de ces indemnités qu’il fallait : « écarter les pistes d’un appel aux dons des fidèles et d’une socialisation du financement. » Les ressources devaient être trouvées uniquement dans le patrimoine de l’Église et des coupables.
un fonds financé par les fidèles…
Ce fonds, dénommé fonds de solidarité et de lutte contre les agressions sexuelles sur mineur (Selam), créé à cette fin, dispose d’un site où on peut lire dans la rubrique : qui peut contribuer au fonds ?
« Le fonds est financé par des personnes morales et physiques […] les diocèses seront des contributeurs essentiels et non exclusifs. La possibilité de soutenir le fonds par des dons et bien entendu ouverts à toute personne morale qui en a la capacité. Des évêques (en activité et émérites), des laïcs, des clercs ont déjà fait des dons personnels.
À leur suite, les fidèles laïcs, prêtres et religieux, et toutes les personnes qui souhaitent soutenir l’action du fonds de dotation peuvent lui verser une contribution. »
Ce fonds qui a ainsi pris l’allure d’un « Cathothon » avait réuni 20 millions d’euros à fin janvier 2022.
On peut constater que par cet appel à la générosité des donateurs, l’Église a trouvé le moyen d’échapper à sa responsabilité qui est d’indemniser uniquement sur son patrimoine et celui des coupables, les victimes des agissements de certains de ses membres et de son silence.
et par les contribuables!
Pire encore, par le système de défiscalisation des dons, c’est l’État qui participera à cette indemnisation. Or l’État, ce sont les contribuables, et en partie les victimes elles-mêmes, qui participeront indirectement à leur propre indemnisation.
Le sénateur des Hauts-de-Seine Pierre Ouzoulias avait déposé en février une question écrite au ministre de l’économie dans laquelle il demandait : «s’il est moralement acceptable que l’État, par des libéralités fiscales, participe au financement de mesures de réparation destinées à des victimes d’actes commis uniquement au sein de l’Église catholique. Si le seul objet du fonds Selam est de les indemniser, il se demande alors s’il ne serait pas plus conforme à la recommandation de la Ciase, acceptée par la conférence des évêques de France, que les apports des particuliers soient exclus des sources possibles d’abondement de ce fonds. »
On attend toujours la réponse…
Martine Cerf